QUAND UN PHARE EGARE … A QUI LA FAUTE ?

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Me André Michel faisant office de porte parole de l’opposition politique en Haïti, a attiré mon attention, lorsqu’il déclare dans ses propos relatifs à la note du Conseil Supérieur du Pouvoir Judiciaire(CSPJ), que celui ci est l’organe d’exercice du pouvoir judiciaire. Tant en  fait qu’en droit qu’il est Co-dépositaire de la souveraineté. De ce fait, par sa note, le Pouvoir Judiciaire a constaté la fin du mandat  constitutionnel  de M. Jovenel Moise.

Je ne compte pas le démentir. Je me garde de prendre le contrepied des politiques et des grands débateurs. Je laisse aux experts, en tout, le soin d’y décider, et de continuer, par leur interprétation intéressée et partisane de la constitution, à conduire le pays  au fond du bourbier. 

Par ce constat, qu’il me soit permis tout simplement de produire des réserves sur ses propos quant à la violation des règles d’attribution ou de mission du CSPJ, pour non respect du principe de séparation des trois Pouvoirs de l’État et enfin  de faire une considérations d’ordre politique. 

Premièrement, selon les termes des articles 173 de la Constitution, premier du décret du 22  août  1995, relatif à l’organisation judiciaire et  de l’article premier de  la loi portant statut de la magistrature, le pouvoir judiciaire est exercé par la Cour de Cassation, les  Cours d’Appel, les Tribunaux de Première Instance, des Tribunaux de paix et des Tribunaux spéciaux. 

A bien comprendre la lettre et l’esprit de ces articles, il est évident que l’ossature d’organe devant exercer le pouvoir judiciaire n’est autre que les Cours et les Tribunaux. Les Cours et les Tribunaux tranchent en cas de litige. Par ce fait, ils concourent à la distribution de la Justice. Il est dévolu à la Cour de Cassation de statuer en Sections réunies sur les cas d’inconstitutionnalité des lois, d’après l’article 141 du décret du 22 août 1995. 

Toutefois, pour bien comprendre l’étendue, la portée de la mission du Conseil Supérieur du Pouvoir Judiciaire(CSPJ), on doit se référer aux articles légaux suivants : l’article Premier  de la loi créant le CSPJ et l’article 184-2 de la constitution. Il exerce  sur les magistrats un droit de surveillance et de discipline, et dispose d’un pouvoir général d’information sur la magistrature. 

Le CSPJ ne dispose pas de prérogatives d’interpréter la loi. Son pouvoir est limitativement disciplinaire et administratif. Les résolutions du Conseil Supérieur du Pouvoir Judiciaire  n’ont de force contraignante que sur les Magistrats et sur le personnel judiciaire. Toutes les dispositions relatives à l’organisation judiciaire précisent que l’exercice du pouvoir judiciaire se manifeste à travers les Cours et Tribunaux. Le Conseil Supérieur du Pouvoir Judiciaire ne fait que dessaisir le  Pouvoir Exécutif  du  pouvoir disciplinaire sur les magistrats. 

Deuxièmement pour non-respect du principe de séparation des pouvoirs. Dans toute société dite démocratique et moderne, le principe de la  séparation  des pouvoirs  est consacré. Lequel principe est conçu dans le but de contrebalancer les pouvoirs dont Montesquieu fut un artisan. Haïti a emboité le pas. Se référant au préambule et  aux dispositions des articles : 60 ; 60-1  et 60-2 de la Constitution haïtienne de 1987 amendée, chaque pouvoir est indépendant des deux autres dans ses attributions. Aucun pouvoir ne peut faire immixtion pour statuer pour le maintien ou le départ d’un autre. En essayant d’indiquer les motifs de sa résolution, le Conseil Supérieur du Pouvoir Judiciaire a outrepassé son pouvoir. Il n’a pas respecté les limites fixées tant par la Constitution que la par la LOI.  Il n’a pas de prérogatives autres que celles confiées par la Constitution et la loi.

Enfin, il est venu le moment de déceler dans les prises de positions des acteurs politiques de l’opposition une incohérence évidente. Monsieur Jovenel MOISE, président de la République est largement critiqué pour avoir dit constater la caducité du parlement au cours du mois de Janvier 2020. Des critiques, par principe, qui sont fondées.  Il est étiqueté de vouloir instaurer une dictature dans le pays. Il a violé, dit-on, la Constitution. Aujourd’hui, ces mêmes acteurs de l’opposition applaudissent des deux mains la résolution du  Conseil Supérieur du Pouvoir Judiciaire constatant l’échéance du mandat présidentiel. Alors que le Conseil Supérieur du Pouvoir Judiciaire n’a pas cette attribution. Il a outrepassé son pouvoir. Aucun pouvoir ne peut sortir dans les limites fixées par la Constitution. A bien comprendre, les opposants au pouvoir ne défendaient pas le respect du principe de la séparation des pouvoirs  qu’ils estimaient être juste mais une fixation de camp. En s’appropriant la résolution du CSPJ pour consolider leurs argumentaires et  pour réclamer le départ de M. Jovenel MOISE, ils se contredisent. 

Il existe des solutions juridiques et politiques à la crise politique actuelle que connait le pays. Il faut que la classe politique et les élites les mettent en œuvre et qu’elles cessent donc de faire des interprétations de manière intéressée  et partisane des  lois.  

Je termine en rappelant que ma position pour le maintien ou le départ de M. Jovenel MOISE est institutionnelle. Et, à défaut de cette institution capable de trancher, la solution à la crise politique actuelle doit être trouvée par les acteurs politiques en face. Donc, elle doit être une solution médiane. 

Jeanel JEROME, Avocat au Barreau de Saint-Marc.

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